lundi 25 février 2013

L’évolution des menus lors des réceptions officielles des présidents de la République Française de 1959 à 1981



Conférence de Franck Philippe (Lycée Hôt. Santos Dumont St Cloud)

Le 22 février 2013, dans le cadre du programme des rencontres de l’honnête volupté.

Abstract rédigé par l’auteur.


«Les tables napoléoniennes proposent une grande richesse de mets. Le poissonnier Méric à Paris livre une belle variété de poissons au palais de l’Élysée : turbots, darnes de saumon, crêtes de morues, raies, brochets, cabillaud, anguilles, truites, soles, barbues, barbillons, carrelets, seiches, carpes, écrevisses, limandes, rougets, harengs, homards». Autant de produits que l’on peut retrouver sur la table élyséenne, un siècle et deux Républiques Françaises plus tard…
Le dîner du 24 juin 1964 offert par le Général de Gaulle, au Palais de l'Élysée, en l'honneur de Son Altesse Royale Samdech Préah Norodom Sihanouk Upayuvareach, chef de l'État du Cambodge propose un consommé froid «Rubis», des suprêmes de soles «Marigny», un dindonneau de Bresse sauce Périgueux accompagné de fonds d'artichauts «Saint-Germain» et un dessert des fraises «Melba», soit un repas à quatre services.
Quel chemin parcouru, quelle évolution en un siècle de réceptions et de menus à la table de la présidence de la République Française ? Quelle différence entre le «caneton de Rouen au cresson» servi sous Napoléon comme un nouveau produit, et la «pêche Melba», servie sous Charles de Gaulle, mais créée en 1893 par Auguste Escoffier qui dirigeait les cuisines de l'hôtel Carlton à Londres.
L’étude présentée tente de répondre à ces questions en approfondissant les menus de réceptions officielles, au cours de la Ve République, sous trois présidences continues : Charles de Gaulle, un général qui débute la toute nouvelle Ve République durant la période de 1959 à 1969. De 1969 à 1974, Georges Pompidou, ancien premier ministre du général, au record de longévité à l’Hôtel de Matignon, prend la suite. Enfin, durant la  période de 1974 à 1981, le plus jeune président de la Ve République est élu à quarante-huit ans : Valéry Giscard d’Estaing . Ces trois présidents ont eu une accession au pouvoir très différente et ils ont aussi exprimé, au cours des responsabilités qui leur a été confiées, leur personnalité singulière voire atypique autour de la table présidentielle, même s’ils ont des convictions politiques proches.
La spécificité française en matière de préparation culinaires, de production de produits alimentaires de qualité ou la longue expérience en matière vinicoles, restent des références que les présidents de la République, souhaitent conforter et promouvoir. Leur origine familiale et sociale, leur formation, leur expérience politique, leurs préférences culinaires ont permis à ces trois présidents de dompter un protocole parfois rigide en donnant à la table présidentielle, outre le faste nécessaire qu’il convient, un vrai témoignage de leur différence de style.
Anthelme BRILLAT-SAVARIN disait : «Les repas sont devenus un moyen de gouvernement, et le sort des peuples s'est décidé dans un banquet». Chaque président de la République a souhaité laissé une empreinte de son mandat, celle de ses goûts culinaires n’a pas échappé à ceux qui ont partagé les grandes réceptions officielles en l’honneur de chefs d’États et souverains étrangers. Mais c’est une certaine continuité de l’État qui a permis de promouvoir le sens aigu du raffinement des réceptions françaises présidentielles. En politique comme ailleurs, le repas, qu’il soit d’ordre privé, officiel, de travail ou d’État, permet de concilier les oppositions, de rapprocher les contraires, de trouver le compromis qui résulte de l’essence même du partage de la nourriture, celle de la pacification sociale et politique. Car la politique divise les hommes, la gastronomie les réunit.
 

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